
Résumé

Le présent mémoire se veut un guide sur la façon de favoriser le développement durable dans les communautés rurales d’Afrique australe par la gestion responsable des ressources naturelles locales. Il explore plusieurs mesures clés que le gouvernement canadien peut adopter pour favoriser de telles initiatives tout en contribuant au développement international, à la durabilité environnementale, à la bonne gouvernance et à l’établissement de partenariats mondiaux. Le Canada devrait élaborer à l’égard de l’Afrique une politique ciblée de gestion des ressources naturelles qui utilise les structures politiques existantes pour favoriser l’autonomisation des collectivités. Le Canada jouit d’un avantage concurrentiel mondial en matière de gestion des ressources naturelles et se classe constamment parmi les pays les mieux placés pour ce qui est des indicateurs de gouvernance. Le Canada est donc idéalement positionné pour réussir avec une politique axée sur la gouvernance communautaire durable des ressources.
Enjeu
- Bon nombre de pays d’Afrique ont un passé de mauvaise gouvernance des ressources qui a entravé une croissance économique généralisée et durable, ainsi que le développement d’institutions démocratiques solides.
- De nombreux pays africains sont riches en ressources naturelles, et une gouvernance efficace et responsable de ces ressources peut améliorer les moyens d’existence tout en créant des emplois pour la population du continent, en croissance rapide.
Contexte
- Les ressources naturelles telles que la faune sauvage, les forêts et l’eau douce ont souvent été surexploitées et gérées de manière non durable, exacerbant la pauvreté des populations locales tout en augmentant la dégradation de l’environnement. C’est un problème qui touche les populations locales, mais aussi la communauté mondiale, car les questions environnementales ne connaissent pas de frontières.
- Environ 60 % de la population du continent pratique une forme ou une autre d’agriculture de subsistance comme moyen de survie. Ces moyens de subsistance dépendent fortement des ressources naturelles locales.
- La littérature pertinente indique que le sous-développement persiste souvent en raison de pratiques agricoles de subsistance non durables et improductives, résultant d’un manque de ressources et d’expertise pour investir dans de nouvelles techniques de gouvernance des ressources et les développer.
- Les politiques telles celle des « forteresses de conservation », qui visent à limiter l’utilisation des ressources par les populations locales et ont été mises en place par des gouvernements lointains, échouent souvent, car elles ne tiennent pas compte des besoins des résidents locaux.
- Les constatations de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture donnent à penser qu’une politique ciblée de gestion des ressources naturelles pour l’Afrique peut contribuer à réduire la pauvreté et l’insécurité alimentaire, tout en prévenant la dégradation de l’environnement.
- Le Canada entretient des relations en Afrique depuis plus d’un demi-siècle en établissant des liens étroits avec les pays africains et avec les organisations régionales et internationales présentes sur le continent.
- Le Canada est particulièrement bien placé pour élaborer une politique spécifique et ciblée en matière de ressources naturelles pour l’Afrique qui protégerait des ressources limitées, favoriserait la croissance économique et faciliterait la démocratie et la bonne gouvernance.
Facteurs à considérer
- Une piètre gouvernance au niveau national a contribué à de graves problèmes environnementaux tels que la déforestation, l’érosion des sols, la désertification, la dégradation des zones humides, les infestations d’insectes et l’appauvrissement des populations fauniques. Cela a conduit les bailleurs de fonds du développement à mettre l’accent sur la participation et l’autonomisation des communautés, de manière à favoriser l’appropriation locale et une meilleure gestion des ressources naturelles.
- Ces programmes doivent tenir compte des réalités locales, en tenant pleinement compte des cultures, traditions et structures de gouvernance locales.
- La gouvernance locale des ressources peut être plus efficace lorsqu’elle s’appuie sur les structures et les institutions existantes, bien qu’il faille être sensible aux inégalités existantes, en particulier sur les plans du sexe et de l’origine ethnique.
- Les mécanismes de contrôle et de responsabilisation font partie intégrante de la solution, car l’autonomisation des instances et structures de pouvoir au niveau local ne permettra pas nécessairement de résoudre les problèmes existants.
- Les priorités du Canada pour l’Afrique subsaharienne sont les suivantes :
- Promouvoir l’aide au développement
- Promouvoir la démocratie
- Promouvoir la paix et la sécurité
- Resserrer les liens commerciaux et économiques
Recommendations
- La politique de gouvernance des ressources du Canada pour l’Afrique devrait déboucher sur un cadre stratégique souple qui pourrait être adopté par les collectivités concernées.
- Le cadre stratégique devrait tenir compte des quatre priorités définies par Affaires mondiales Canada et mettre l’accent non seulement sur le développement durable des ressources, mais aussi sur l’autonomisation des collectivités et le développement institutionnel local.
- Le cadre devrait aller au-delà des approches bilatérales traditionnelles axées sur la coopération d’État à État ou de ministère à ministère, et mettre plutôt à contribution plusieurs ordres de gouvernement de manière à établir une collaboration avec des structures de gouvernance infranationales et informelles favorisant une approche ascendante pour l’élaboration des stratégies de gestion des ressources naturelles.
- Le cadre devrait mettre l’accent sur la participation directe des collectivités à l’élaboration de stratégies qui tiennent compte des variations et des réalités locales et qui sont planifiées en fonction de celles-ci.
- Le cadre devrait viser à faire participer les structures politiques et sociales existantes dans les communautés au développement des capacités démocratiques grâce à des mécanismes de contrôle élaborés à l’interne pour assurer un partage équitable des ressources et des processus décisionnels.
- Le cadre devrait être axé sur les résultats et s’appuyer sur les succès tout en tirant les leçons des échecs. Des ressources et de la formation devraient être fournies aux individus et aux communautés qui réussissent afin qu’ils puissent s’engager dans le partage des connaissances et des ressources avec d’autres communautés voisines, de manière à faire connaître les réalisations.
- Le cadre devrait donner aux communautés les moyens de prendre des décisions à tous les niveaux afin d’assurer des partenariats et d’empêcher les intérêts et les acteurs extérieurs d’obtenir une influence indue, comme cela s’est déjà produit avec des approches antérieures qui ont échoué.

Rita Abrahamsen est professeure titulaire à l'École supérieure d'affaires publiques et internationales et Directrice du Centre d’études en politiques internationales (CÉPI) à l’Université d’Ottawa. Ses intérêts de recherche portent sur la politique africaine, la sécurité et le développement, la privatisation de la sécurité et les théories postcoloniales.

Andrew Heffernan est candidat au doctorat en sciences politiques à l'Université d'Ottawa. Ses recherches portent sur la politique africaine, la gouvernance environnementale mondiale, les relations internationales et les assemblages.