
Résumé

Le Canada a, en matière d’accueil de réfugiés et d’autres migrants, une longue tradition qui bénéficie d’un large appui, mais il n’en fait pas assez face aux crises actuelles de réfugiés à l’étranger. De plus, les politiques canadiennes rendent la réunification des familles beaucoup trop difficile. Le programme d’accueil de réfugiés du Canada devrait être modifié comme suit :
- Hausser à au moins 65 000 par année le nombre de réfugiés et de personnes protégées accueillis.
- Abolir les plafonds du Programme de parrainage privé de réfugiés.
- Allonger à deux ans la période pendant laquelle les réfugiés peuvent soutenir la migration de membres de leur famille.
- Accroître le nombre de membres de la famille qui peuvent être parrainés au cours de cette nouvelle période de deux ans.
- Augmenter le nombre de visas pour parents et grands-parents.
- Rendre permanent le Rainbow Refugee Assistance Plan (programme arc-en-ciel d’aide aux réfugiés).
- Augmenter à 6000 le nombre de réfugiés libyens admis en provenance des centres de détention libyens.
Enjeux
Les principaux enjeux sont les suivants :
- Le petit nombre de réfugiés admis, en particulier ceux qui sont les plus vulnérables, y compris les réfugiés LGBTQ et ceux qui sont piégés en Libye (situation exacerbée par les limites imposées quant au nombre de personnes pouvant être parrainées par le secteur privé);
- Les difficultés qu’éprouvent les réfugiés nouvellement admis à réunir leur famille au Canada.
Contexte
- Le Canada est un pays riche qui accueille depuis longtemps et avec succès des réfugiés et des immigrants. Les Canadiens appuient l’admission d’un grand nombre d’immigrants et de réfugiés.
- En raison de notre situation géographique, les réfugiés ne peuvent généralement pas atteindre nos frontières sans notre permission.
- En 2015, alors que la dévastation causée en Syrie attirait l’attention de la communauté internationale, le Canada a offert d’accueillir, éventuellement, près de 50 000 réfugiés syriens. Ces personnes s’intègrent bien, ce qui donne à penser que le Canada peut, et donc devrait faire davantage pour ceux qui ont un besoin criant de réinstallation.
- Le Programme de parrainage privé de réfugiés, en particulier, permet aux citoyens d’assumer le travail de collecte de fonds et d’établissement des réfugiés. Près de 20 000 des réfugiés syriens admis l’ont été grâce au travail de groupes de parrainage privés. Il y a une liste d’attente de répondants privés qui sont prêts à appuyer l’admission d’un plus grand nombre de réfugiés. Il n’y a aucune raison valable de retarder ces admissions en imposant des plafonds arbitraires.
- Les politiques du Canada font qu’il est trop difficile pour les réfugiés d’être réunis avec leur famille au Canada.
- Le Canada cherche à être un chef de file dans l’accueil des réfugiés LGBTQ à l’échelle mondiale, mais le Rainbow Refugee Assistance Plan est temporaire et doit être renouvelé tous les ans ou les deux ans, contrairement aux autres programmes de Parrainage d’aide conjointe qui accordent la priorité aux réfugiés vulnérables.
Facteurs à considérer
- Le Canada a l’obligation internationale d’accueillir les demandeurs d’asile, ainsi qu’un engagement mondial à faire sa juste part pour appuyer la réinstallation des réfugiés. En outre, les options qui s’offrent aux réfugiés dans le monde entier s’épuisent.
- Les réfugiés apportent des avantages économiques au Canada.
- Le tissu social et économique du Canada est particulièrement bien adapté à l’accueil des réfugiés en vue d’une intégration rapide.
- La grande majorité des Canadiens appuient l’admission d’un grand nombre d’immigrants et de réfugiés.
Autres considérations liées aux politiques :
Le droit d’être avec sa famille est un droit humain fondamental. Les possibilités de regroupement familial pour les réfugiés admis devraient être rendues plus accessibles. Cela peut se faire en prolongeant la période dont disposent les réfugiés réinstallés pour parrainer leur famille, en élargissant le nombre de membres de la famille qu’ils peuvent parrainer, ainsi qu’en augmentant considérablement le nombre de visas accordés dans la catégorie des parents et grands-parents.
Le Canada a une obligation particulière envers les réfugiés très vulnérables, qu’il reconnaît habituellement par l’entremise de ses programmes d’aide conjointe. Ces programmes permettent de leur accorder la priorité en matière d’admission et d’établissement. L’obligation du Canada à l’endroit des réfugiés LGBTQ, qui ont grandement besoin de soutien, devrait être officialisée en rendant permanent le Rainbow Refugee Assistance Plan.
Les conditions auxquelles sont confrontés les migrants et les réfugiés en Libye se détériorent de jour en jour. Le Canada s’est déjà engagé à accueillir 600 réfugiés de plus en provenance de la Libye ou de centres de détention libyens, de sorte qu’il disposera des ressources d’établissement nécessaires pour les appuyer et pourra ainsi en accueillir davantage.
Recommandations
- S’engager à accueillir au moins 65 000 réfugiés et personnes protégées par année, comparativement à 45 000 en 2017, ce qui concorde avec la fourchette supérieure prévue pour 2021.
- Permettre à tous les Canadiens désireux de parrainer en privé de le faire, ce qui signifie l’abolition des plafonds du Programme de parrainage privé de réfugiés.
- Faciliter le regroupement familial en faisant passer le délai d’un an à deux ans et élargissant le nombre de personnes qui peuvent être admises dans le délai d’un an.
- Hausser considérablement le nombre de super visas pour parents et grands-parents, y compris réserver certains d’entre eux pour les familles des réfugiés.
- Rendre permanent le Rainbow Refugee Assistance Plan, en protégeant en particulier la dimension « hors quotas » de sa variante temporaire actuellement en vigueur.
- Accueillir d’urgence 6000 réfugiés des centres de détention libyens.

Patti Lenard est professeure agrégée en éthique à l'École supérieure d’affaires publiques et internationales de l’Université d'Ottawa.
Ses recherches portent sur l’immigration, y compris les travailleurs étrangers temporaires, les réfugiés, les étudiants étrangers et les résidents permanents; le multiculturalisme, y compris les succès et les échecs des politiques multiculturelles et la confiance entre les diverses communautés; l'intégration des immigrants, y compris les stratégies d’inclusion, au Canada et dans les états d’Europe occidentale, et la participation politique des immigrants (y compris le droit de vote des non-citoyens); et plus généralement la théorie démocratique.